Et l’actrice fut… Et la femme fuit, de toute part, comme une passoire, ainsi, s’enfuit en flaques,
comme 1 etang retourne entre deux ecluses
tel une flaque
batik de soupirs teinture de lapements assurant les rivieres
incruste du venin d’ecchymoses
aspire tantot au puits,
Darling River, Les Variations Dolores, Sara Stridsberg
Darling River, les variations Dolores, Stock La Cosmopolite – 350 pages, 20,50 € . Ecrivain(s): Sara Stridsberg Edition: Stock
Darling River, les variations Dolores est, comme le titre l’indique, une serie de variations. Variations autour du Lolita de Vladimir Nabokov et de son personnage principal devenu figure symbolique. Variations a travers quatre destins de lolitas.
La toute premiere des lolitas, Lo, a treize ans. Son pere l’a baptisee Dolores en hommage au roman de l’ecrivain russe qu’il kiffe tant. Notre soir venu, ils montent dans sa voiture et parcourent les routes, a travers un paysage apocalyptique de forets ravagees par des incendies. Ils roulent toute la nuit et ne reviennent qu’a l’aube. A l’occasion, le pere percute des animaux sur le bord de la route ou arrete son engin pour s’exercer au tir via des robes et des chemises ayant appartenu a sa femme, la mere de Lo, aujourd’hui disparue.
Lo ne le considere nullement comme un pere, mais plutot tel 1 frere, comme s’ils etaient l’ensemble des deux des orphelins abandonnes par un tante.
« Papa adorait rouler en voiture. il prenait le volant et emmenait maman pour de grandes promenades la nuit. Ils faisaient l’amour dans la voiture, mangeaient et dormaient dans la voiture garee sur la place. . Quand maman n’a plus voulu l’accompagner, j’ai pris sa place ».
Nouvelles venitiennes, Dominique Paravel
Nouvelles venitiennes, 185 pages, 2011 . Ecrivain(s): Dominique Paravel Edition: Serge Safran editeur
Qu’est-ce qui se trame ici ? Ce petit livre precieux est ecrit comme on tisse, l’enchevetrement des histoires correspond au dedale des rues de Venise, metropole morte, metropole vive, ville labyrinthe. A travers les ages et les saisons, la narratrice nous fera suivre un fil conducteur, le double fil de l’art ainsi que l’amour. Du tailleur de pierre qui remporte le pari d’eriger les piliers de granit, obtenant la jouissance de l’espace entre eux, au peintre dont le portrait de jeune homme passe d’une histoire a l’autre, echouant la ou on ne l’attend pas, a Viola, sculptant 1 ange pour votre monument funeraire, ainsi, guidant son interlocuteur via mobile interpose, dans les rues-dedale de Venise.
Un livre qui donne le desir de s’elargir a l’espace et au souffle de cette ville, en (re)visiter, en (re)decouvrir, aussi de l’interieur, d’ecouter quelles musiques elle donne a entendre, quels tableaux celle-ci donne a voir… comme le photographe (e)perdu d’une derniere nouvelle avec lequel le redacteur en chef fait votre marche : des photos de Venise contre votre reportage reve au Mexique, ainsi, qui ne trouve pas grand chose a photographier tant Venise se montre belle de partout, mais aussi attendue de partout.
Une femme marche, profil perdu, l’actrice, theme majeur de votre recueil, l’actrice initiatrice, la femme qui s’entremet, l’actrice aussi dedoublee, qui (se) masque et (se) devoile.
Vie et fond de Ludovico Lauter, Alessandro de Roma
Vie et mort de Ludovico Lauter, traduit de l’italien par Pascal Leclercq, 374 pages, 25 € . Ecrivain(s): Alessandro de Roma Edition: Gallimard
« Il semble tout a fait exact qu’il va falloir juger les films d’apres leur fin ».
Cette phrase tiree du livre pourrait au mieux s’appliquer a Vie et fond de Ludovico Lauter, d’Alessandro De Roma.
Ils font certains livres qu’on a envie d’abandonner avant la fin. Mais on s’accroche quand aussi, sans d’ailleurs bien savoir pourquoi. On continue on se disant qu’il finira bien avec se passer quelque chose. Mais en attendant, on se requi?te ; Qu’est-ce que cherche a penser l’auteur ? Ou veut-il en venir ? Et va-t-on arriver a quelque chose ou perd-on des heures ?
Dans sa premiere part, Vie et fond de Ludovico Lauter est votre livre agreable, rejouissant a lire, mais qui manque singulierement d’eclat. Cette histoire d’ecrivain reclus du monde n’a rien de franchement epoustouflant. Par Quelques cotes, elle pourra aussi paraitre relativement eculee. Et cette toute premiere part dure Di?s Que meme la bagatelle de 290 pages…
Alessandro De Roma aurait pu genereusement tailler au gras bien. 100 pages de moins n’auraient pas fait de mal.
Il demeure alors 90 pages… et quelles pages ! Quelles pages ! Elles vont obliger a repenser tout votre qu’on vient de lire. D’un coup, elles elevent le livre, l’emmenent vers des sommets insoupconnes.
Chants populaires, Philippe Beck
Chants populaires, 2007, 18 euros. . Ecrivain(s): Philippe Beck Edition: Flammarion
Notre poesie contemporaine, hum, vous avez evoque poesie contemporaine ? Quoi ? Vous lisez ca ? Mais on ne comprend pas grand chose ! Et il n’y a peut-etre meme que dalle a comprendre !! La poesie contemporaine, c’est forcement tres eloigne de la vie, d’une langue telle qu’on la parle, telle qu’on la souhaite, telle qu’elle nous seduit, une langue telle qu’on pouvait la dechiffrer, la savourer si l’on etait enfant. De la langue des contes. Vous vous souvenez de l’enfance ? On etait la, au milieu des contes, on vivait dedans. Eh beaucoup, la poesie, c’est exactement l’inverse. On ne va pas vivre dedans, c’est 1 objet curieux, que l’on prend avec des pincettes, que l’on regarde de loin.
Bon. Reprenons. Et si la poesie contemporaine, c’etait exactement l’inverse ? Si la poesie contemporaine pouvait au contraire revivifier le conte de l’interieur ? L’enfance d’une part (comme c’est le cas egalement chez Ariane Dreyfus ou chez Jean Daive dans son tres beau dernier livre Onde generale, surtout dans la section : « Noel des maisons qui n’ont plus d’enfants ») et d’autre part la parole impersonnelle : celle des contes de Grimm precisement. Vous devez ouvrir et lire Afin de s’en convaincre Chants populaires de Philippe Beck. Ce merveilleux livre. Merveilleux, merveilleux, merveilleux. « Mes Chants populaires mixxxer arnaque dessechent des contes, Pluti?t. Ou les humidifient a nouveau », comme l’ecrit l’auteur au sein d’ son avant-propos.